Lutte biologique contre l’ambroisie

Depuis 2020, l’équipe du Dr. Nicolas Desneux de l’INRAE de Sophia Antipolis pilote un ambitieux programme de lutte biologique contre l’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia), une plante invasive originaire d’Amérique du Nord, responsable de fortes allergies respiratoires. Ce projet de recherche appliquée, prévu pour s’étendre sur plus d’une décennie, mobilise chercheurs, doctorants et stagiaires autour d’une méthode innovante : l’introduction contrôlée d’un insecte herbivore, Ophraella communa, spécifiquement adapté à cette plante.

L’ambroisie a été observée pour la première fois en France en 1863, dans le département de l’Allier.

Plus de 150 ans plus tard, ce même territoire devient le théâtre d’une expérimentation inédite à l’échelle nationale. L’Allier est en effet le premier département à tester cette méthode de régulation biologique, aux côtés de quelques départements d’Occitanie. C’est dans cette optique que Vichy Communauté a décidé de mettre à disposition une parcelle dont elle est propriétaire afin de permettre la mise en œuvre de l’expérimentation.

Au cœur de ce projet, Mme Zoé Rousset, doctorante à l’INRAE, consacre sa thèse à l’étude d’Ophraella communa, également appelée chrysomèle de l’ambroisie. Elle est accompagnée de Mme Sophie Agostini, stagiaire Ingénieur Agronomique, sous la direction du Dr. Desneux, directeur de recherche INRAE. Ensemble, ils conduisent et supervisent une méthodologie rigoureuse d’introduction de l’insecte dans l’environnement, avec le soutien conjoint des ARS et Fredon d’Auvergne-Rhône-Alpes et d’Occitanie.

Le protocole de lâcher consiste à inoculer des sites fortement infestés par l’ambroisie avec 150-200 Ophraella communa adultes. Dix sites dans l’Allier ont été choisis, dont cinq avec des lâchers en cages et cinq sans (afin de comparer les dynamiques de propagation). Dans les cages les insectes pondent durant une semaine avant d’être ensuite relâchés des cages pour observer leur dispersion et l’expansion de leurs populations. Cette stratégie vise à évaluer l’efficacité du dispositif et à améliorer les futures introductions.

Ophraella communa a été observée pour la première fois en France à Lyon en 2023, mais les circonstances exactes de son arrivée sur le territoire national restent inconnues. En laboratoire, une femelle pond en moyenne 20 œufs par jour. Après trois générations – soit environ mi-juillet – la population est censée atteindre un seuil suffisant pour freiner significativement la croissance de l’ambroisie, juste avant sa floraison, période critique pour les personnes allergiques.

L’insecte présente une niche écologique très restreinte : il se nourrit exclusivement d’ambroisie, ce qui limite les risques pour les autres espèces végétales et animales. Il résiste à des températures allant jusqu’à au moins -9°C, bien que la moitié de la population puisse disparaître durant l’hiver, selon les conditions climatiques et environnementales.

Cette première phase marque le début d’un déploiement progressif sur l’ensemble du territoire français. Si les résultats sont concluants, d’autres lâchers seront organisés dans les années à venir, avec l’espoir de réduire durablement l’impact sanitaire et écologique de cette plante envahissante.